J'suis en vie... [PV: Mon directeur de n'amour <3 *-*]

Yoshiyuki montait tranquillement les marches de l’escalier qui menait au toit. Il était tôt, dans la matinée et les cours allaient commencer dans les prochaines minutes. D’ailleurs, il avait la ferme intention de ne pas s’y rendre. C’est parce qu’il avait très mal dormi, la nuit dernière... la précédente aussi, d’ailleurs. Cette sensation qu’il connaissait trop bien... comme un manque... il en avait mare, il avait bien essayé de l’endurer, mais non, ça ne fonctionne pas comme ça. Peut-être que c’était lui qui n’était pas assez résistant? S’il avait l’intention de régler son « problème », il devrait prendre son mal en patience. Mais pas là... c’était pas de se mettre à taper sur tout ce qui bouge, aussi, non? C’était bien mieux s’il faisait ça de cette façon là... Yoshiyuki soupira et déposa sa main sur la rampe tandis qu’il montait. Tiens, elle tremblait, cette main. Arrivé en haut, il poussa la porte qui menait au toit et fit quelques pas. Il balaya l’endroit de son regard bleu. Parfait, y’a personne. Les autres élèves devaient tous attendre sagement le début des cours. Il sourit, amusé.

Yoshiyuki s’avança tranquillement sur le toit tandis qu’une brise lui ébouriffait les cheveux. Agacé, il sortit un bonnet de son sac et le mis brusquement sur sa tête, écrabouillant ses cheveux par la même occasion. Pas question de se laisser déranger par ce genre de détail. Il s’approcha de la rambarde et s’y appuya. Il regarda en bas... Il y avait plusieurs étudiants qui se dépêchaient d’entrer dans le bâtiment pour ne pas être en retard. Il jeta un œil à sa montre. Les cours allaient commencer dans quelques secondes, là. Il secoua la tête... tiens, pourquoi il perdait son temps comme ça? Il se retourna, fit quelques pas et alla s’asseoir sur le sol, le dos appuyé sur un mur de béton, pas trop loin de la porte par laquelle il était entré. Il releva la tête vers l’arrière, ferma les yeux. Inspire, expire. Oh là, pourquoi essayer de se calmer, là? C’est pas comme si ça allait fonctionner. Yoshiyuki redressa la tête, regarda devant lui pendant quelques fractions de secondes. Il entendit vaguement la cloche sonner, annonçant le début des cours. Puis, il baissa les yeux vers son sac, entreprit de chercher quelque chose, à l’intérieur. Puis, il ressortit sa main du sac, ayant de toute évidence trouvé ce qu’il cherchait. Il sortit une petite boîte en fer dont le couvercle était recouvert de motifs en trèfles rouges. Il l’ouvrit, délicatement, en sortit une petite lame, la déposa dans la paume de sa main droite. Il en caressa la surface, du bout des doigts. Puis, il la plaça entre le pouce, l’index et le majeur de sa main droite. Doucement, il vint la faire glisser le long de son poignet dénudé. Toujours au même endroit, le poignet gauche. Il fit un trait rouge, sur sa peau blanche, qui dégoulina rapidement. Voilà, comme ça... enfoncer la lame, encore un peu plus. Voir jusqu’où aller... Il remonta le long de son avant-bras, multipliant les incisions. Il frissonna de plaisir... Voilà, juste ce qu’il lui fallait pour faire taire ses envies.

Puis, il entendit la porte du toit grincer. Pas fort, mais quand même. Elle est en train de s’ouvrir. Quelqu’un vient. Merde. Yoshiyuki déposa sa lame dans la boîte aux trèfles et fourra cette dernière dans son sac. Il regarda son bras ensanglanté. Il sortit son blouson de son sac en vitesse et le jeta par-dessus lui-même. Bon, comme ça, son bras était caché... Mais il allait faire quoi, après? Il entendait le son quasi-imperceptible des gouttes de sang qui tombaient sur le sol... une à une.

Yoshiyuki était figé sur place. Il attendait que la personne derrière la porte daigne se pointer. Il jeta un œil à sa main droite, qui maintenait son blouson en place. Elle tremblait encore... cette fois c’était parce que... il avait peur? Il avait pas envie qu’on le voit avec son bras tout sanglant. C’était arrivé qu’une fois que quelqu’un l’aie vu comme ça et... Oh la, la réaction. Bref, il avait pas trop envie de remettre ça. Et disons qu’il avait l’air plutôt louche, avec son blouson comme ça, par-dessus son bras. Il allait devoir l’enlever un jour ou l’autre, et là... Et si c’était quelqu’un de l’autorité? Un des membres du personnel? Il allait falloir qu’il retourne en classe... mais, non, voyons, on n’envoie pas un gars au bras ensanglanté en cours, voyons... Yoshiyuki tenta de stopper les tremblements de sa main. Aucune raison d’avoir peur, en fait. Il pouvait lui arriver rien de pire, là. D’ailleurs, il commençait à avoir hâte que l’autre se pointe, qu’il lui enlève son blouson... Ouais, si ça continuait comme ça, il allait finir par le salir. Il avait déjà salit le sol, comme ça.

Puis, comme si son vœu avait été exaucé, il entendit la porte s’ouvrir plus rapidement. Il tourna la tête dans cette direction et vit un homme plutôt grand, portant des lunettes, les cheveux... ah. L’homme qu’il avait identifié comme étant le directeur avait disparu, maintenant. Il le chercha des yeux, un peu lent à la détente, dans l’état dans lequel il était. Il baissa les yeux, puis sursauta en apercevant la paire de lunettes du directeur à quelques centimètres de lui... et le directeur qui rampait, tâtonnait pour les retrouver. Il les lui aurait bien données... mais non, pas bouger. Garder le blouson en place. Même s’il lui faudrait bien bouger à un moment ou un autre... le plus tard serait le mieux. D’ailleurs, le directeur finit par les retrouver, ses lunettes. Il les ramassa, puis les remit en place sur son nez. Puis... toujours à quatre pattes, il releva la tête... Yoshiyuki croisa son regard... Choc. C’est là qu’il se rendit compte que le directeur était à une plutôt courte distance de lui... vraiment trop près. Celui-ci sembla s’en rendre compte, car il rougit. Ou bien c’était parce qu’il avait trébuché, Yoshiyuki ne savait pas trop... Le directeur toussota et se mit à sourire... au tour de Yoshiyuki de rougir. Il détourna les yeux, embarrassé. Puis il sentit le directeur faire un mouvement... se déplacer, venir se placer... juste à côté de lui. S’adosser au même mur. Beaucoup trop près, encore... Il lui adressa la parole : « Tu es Fujioka-kun si je ne me trompe pas. Quand la cloche sonne tu dois te rendre à tes cours au lieu de venir rêvasser sur le toit. Tu n’es pas idiot tu dois sûrement le savoir. Explique moi pourquoi tu es venu ici au lieu d’allé à tes cours? » Yoshiyuki pris quelques secondes pour réfléchir à quoi répondre... Il se demanda pendant un moment pourquoi il disait qu’il n’était pas idiot. Il ne le connaissait pas, non?

« Euh... Je... ça m’ennuie, les cours. »

Yoshiyuki regardait toujours dans la direction opposée à celle où le directeur était. Tout pour ne pas le voir... car peut-être que s’il ne le regardait pas pendant un moment assez long... eh bien, quand il se retournerait, il serait plus là, le directeur. Et qu’il aurait la paix, avec son bras tout mutilé. Qu’il pourrait peut-être même continuer à se l’ouvrir, encore. Il entendit soupirer, à sa droite. Alors il était toujours là, le directeur? Ah, bien oui... c’est la réalité, pas le pays des merveilles. Il tourna doucement la tête vers la droite et jeta un œil vers l’homme qui était toujours assis à côté de lui. Il regardait vers le ciel, à présent, et Dieu qu’il avait l’air inspiré! Il avait l’air sur le point de faire un discours... Et comme prévu, c’est ce qu’il fit. Il se mit à déballer un speach sur ce en quoi les études sont importantes, dans la vie. Et contrairement à ce que Kyouya croyait, Yoshiyuki écouta attentivement. Bien sur, il savait déjà tout ça... d’ailleurs, il était assez convaincu que l’école était utile... et puis, il n’était pas du genre à ne pas écouter, quand quelqu’un lui parlait. Mais bon... il avait beau être attentif, ce que le directeur disait ne le concernait tout simplement pas. Après tout, il avait dit qu’il s’ennuyait, en cours, mais ce n’était pas vraiment le cas... Et même si ça l’avait été, ça n’aurait pas été la première raison au pourquoi il n’était pas en cours.

10 minutes passèrent, pendant lesquelles Kyouya ne cessa de parler. Yoshiyuki se demanda même si c’était possible de parler aussi longtemps, aussi rapidement... puis, le directeur cessa de contempler le ciel et se tourna vers le brun. Yoshiyuki battit des paupières rapidement... se rendit compte qu’il venait de regarder son directeur pendant 10 minutes. Il continua de le regarder pendant une fraction de seconde, le temps de voir son regard et son sourire de tombeur, puis détourna les yeux. Il entendit vaguement le « Je veux t’aider » du directeur. En fait, il avait tourné la tête un peu trop rapidement et il se sentait plutôt étourdi, maintenant. Habituellement, il arrêtait l’hémorragie rapidement, après s’être ouvert les poignets... mais là, il faut croire qu’il avait perdu un peu trop de sang. Là... ça commençait vraiment à tourner.

Ce qui se passa ensuite alla un peu trop vite pour le Yoshiyuki étourdi qu’il était. Une seconde il avait son blouson, l’autre, plus de blouson. Il avait vaguement senti la douleur lorsque le tissu avait frotté sur son bras écorché. Mais il était passé où, le blouson? Il se recroquevilla sur lui-même, tentant de camoufler son bras gauche. Peine perdue, bien sure, car le directeur avait évidemment déjà vu... il ne l’avait pas déshabillé aussi brusquement pour rien. Mais peu importe, il allait essayer, de toute façon. Il serra son bras gauche contre lui, sentit son t-shirt s’imbiber de sang. Il remonta ses genoux vers lui... Mais il ne resta pas comme ça longtemps. Il sentit une main serrer délicatement son poignet, s’emparer de son bras. Il leva les yeux vers le visage furieux de son directeur. Ce dernier avait commencé à nettoyer le sang qui coulait toujours des fines plaies.

Yoshiyuki eut la nausée, soudainement. Il n’avait pas envie que son directeur nettoie ses blessures. Pas du tout. Il dégagea son bras brusquement et se leva... Trop rapidement. Il fit quelques pas, puis, étourdi, trébucha, tomba. Dans sa chute, il heurta un muret et sentit son bras droit, qui était indemne, jusqu’à présent, s’écorcher contre le béton. Les sens amortis, il ne réagit pas assez rapidement pour se rattraper et tomba face première sur le sol. Enfin, il eut quand même le réflexe de tourner la tête, mais ce fut sa joue gauche qui prit tout le choc. Aussitôt qu’il eut touché le sol, il se redressa maladroitement, en s’aidant de ses bras.

« ... J-J’vais vous expliquer, M’sieur... »

Yoshiyuki était encore au sol, accroupi, avec seul support, ses bras amochés. « J’vais vous expliquer ». Expliquer quoi, au juste? Qu’est-ce qu’il comptait dire, maintenant? Qu’est-ce qu’il allait faire, expliquer qu’il s’était ouvert le poignet pour s’empêcher de taper sur tout ce qui bouge? Comme si ça faisait du sens, d’abord! Non, présentement, Yoshiyuki n’était pas dans une très bonne position. Il n’avait aucune idée de ce qu’il devait faire, maintenant. Et d’ailleurs, il commençait à paniquer, sentait les battements de son cœur s’accélérer, ses mains qui tremblaient de plus belle. Et soudain, il sentit une main, la même qui avait épongé ses blessures, empoigner... sa propre main. Sa main droite... Puis, il se sentit soulevé du sol. Nouvelle vague d’étourdissement, la nausée. Il eut à peine le temps de comprendre que c’était le directeur qui l’avait aidé à se relever... qu’on l’entraînait déjà dans les marches de l’escalier qui descendait. Beaucoup trop vite. Yoshiyuki eut l’impression une bonne dizaine de fois qu’il allait tomber en plein visage, encore une fois. Enfin, non, c’était pas trop logique, car s’il tombait, il allait tomber sur le directeur, qui marchait devant lui. Yoshiyuki hésita. Qu’est-ce qui est mieux? Tomber en pleine face, ou bien sur son directeur? Hihi...

Il suivit son directeur dans le dédalle de couloirs qu’il empruntait. Mais où pouvait-il bien l’emmener, comme ça? Une chose était sure, seulement, ça allait trop vite pour Yoshiyuki. Il avait la tête lourde, l’esprit brumeux... Il voyait à peine les couloirs qui défilaient trop rapidement. La faute du directeur, aussi. Pourquoi est-ce qu’il courait, comme ça? Yoshiyuki ne savait pas trop s’il essayait d’être délicat, ou quoi, mais si c’était le cas, eh bien ça ne fonctionnait pas du tout! Il n’avait qu’une envie, lui hurler de s’arrêter! Lui laisser le temps de reposer, au moins. Il avait envie de soupirer... mais ça ne vint tout simplement pas. Il resserra son emprise sur la main du directeur. Si c’était comme ça, il allait continuer à se laisser traîner, voilà tout. Puis, allez savoir comment, ils se retrouvèrent à l’infirmerie. Le directeur le força à s’asseoir sur une chaise. Hein? Mais il venait juste de s’habituer à être debout, là... Le directeur se planta devant lui, avec dans les mains tout le matériel du bon petit infirmier. Désinfectant, bandages, coton. « Ça va piquer un peu », fit-il. Puis, il commença à appliquer le désinfectant sur son bras. Yoshiyuki sentit sa tête tourner et les larmes lui monter aux yeux. Quoi, piquer un peu?! Il avait carrément le bras en feu! Mais... ne pas le laisser paraître, surtout.

« ... Ah... euh, ça va, j’ai l’habitude. »

Parfait, la voix ne tremble pas. Il sourit, s’en félicita. Puis, il regarda le visage du directeur, accroupit devant lui, tout concentré à soigner ses blessures. Il était vraiment pas moche, celui là. Ses yeux, surtout, c’était quelque chose. Et puis, avec ses lunettes, et ses cheveux, pas une mèche de travers. Ça lui donnait l’air plutôt sérieux, comme ça. Soudain, il passa le bout des doigts dans les quelques mèches brunes qui tombaient sur le front du directeur... Ah... tout doux. Tiens, qu'est-ce qui te prend, Yoshiyuki?

Yoshiyuki sentit des doigts se refermer délicatement sur son poignet tandis que lui caressait toujours les mèches soyeuses du directeur. Puis sa main qui devenait captive, emprisonnée par celle de ce même homme. Yoshiyuki baissa les yeux vers le visage de Kyouya. Il crut le voir rougir, l’espace d’un court instant, mais il se redonna rapidement constance, fit comme si de rien était. Il promena son regard sur son visage, croisa son regard. Il contempla quelques instants ces billes miroitantes puis se mit à y observer son propre reflet, qu’il distinguait dans les yeux du directeur. Il ne savait pas trop ce qu’il lui avait pris, tout à coup. Il avait fait ça comme ça, sans penser, avait tendu la main. Le pire c’est qu’il ne se sentait même pas embarrassé que son directeur ait du aller la chercher là-haut lui même, cette main. Pas plus qu’il ne se sentait gêné du fait qu’il gardait sa main dans la sienne. En fait, probablement qu’il était trop dans les vapes pour ressentir quoi que ce soit. Non, pas vrai. Le directeur avait terminé son bandage, et lui, son bras lui faisait toujours un mal de chien! L’homme avait même commencé à désinfecter son coude droit, et il sentait la brûlure vive du désinfectant sur sa blessure. Enfin, c’était moins pire, là, mais quand même. Ça prouvait qu’il était encore là, même rien qu’un peu. Il ressentait encore des choses. Alors il n’était tout simplement pas mal à l’aise… voilà tout. Étrange, il arrivait à se sentir bien avec son directeur. Faut dire qu’il avait toujours eu de meilleures relations avec les adultes. Enfin, c’est relatif, car il en connaissait tout de même une bonne quantité qui ne le portait pas vraiment dans son cœur. Pas du tout, même.

Yoshiyuki se demanda comment il faisait pour penser à tout ça. Il se sentait littéralement vidé. Mais il n’avait jamais réfléchi comme les autres. Enfin, c’est ce qu’il se disait, mais il ne pouvait pas vraiment savoir comment les autres pensaient. Il cessa de contempler son image dans les yeux du directeur, qui lui, entreprenait de soigner sa blessure à la joue, et laissa son regard se balader un peu partout sur lui. Il avait de nouveau envie de le toucher, son visage, cette fois, peut-être. Glisser ses doigts sur cette peau claire. Mais sa main était prisonnière. Et l’autre… bah, non, oublie, fait trop mal. Alors il se contenta de le caresser du regard. Il était vraiment bel homme, ce directeur. Yoshiyuki se dit qu’il aurait bien aimé le voir sans ses lunettes, de nouveau. Il déposa son regard sur les lèvres de l’homme. Là, il avait terminé de le soigner. Il le regardait en souriant… et Yoshiyuki se dit qu’il ne devait pas savoir les effets qu’il faisait, ce sourire. C’était criminel. Comment dire? À la fois séducteur et attendrissant. Charmeur, mais plein de gentillesse. Irrésistible. Yoshiyuki se mordit la lèvre inférieure. Il mourrait d’envie de le retourner, ce sourire. Surtout pas sourire. Il savait que s’il souriait, il n’aurait pas ce qu’il voulait, au fond. Sourire, ça fait trop gentil. Mais au fait, qu’est-ce qu’il voulait, exactement. Puis, il en avait mare, de penser.

« Bon c’est finit. Pour aujourd’hui je crois que je vais te laisser manquer tes cours. Tu réside dans les dortoirs si je me trompe pas. Je vais t’y accompagner, et là bas tu m’expliquera en détail ce qui c’est passé sur le toit tout à l’heure. » Et là, le directeur se leva, toujours tout sourire, et se dirigea vers la porte. « Alors tu viens? »

Yoshiyuki resta sur la chaise quelques secondes. Il regarda le directeur, pendant un instant, battit des paupières. Puis, il baissa les yeux, observa sa main droite. Depuis quand il l’avait lâchée? Il se rendit compte qu’il n’en avait aucune idée. Il releva les yeux vers le directeur. Ah oui… donner des explications. Il se leva tranquillement, s’attendant à voir éclater la troisième guerre mondiale dans sa tête. Mais non… faut croire que ça lui avait fait du bien, de rester assis, un peu. Il se sentait moins étourdi. Il se dirigea doucement vers le directeur, puis passa devant lui, sortit à l’extérieur de l’infirmerie. Il se sentait beaucoup mieux, maintenant… Il se dit que c’était peut-être la brûlure du désinfectant, qui l’avait réveillé. Il secoua la tête.

« Oui… Moi, ma chambre est au troisième étage. »

Il prit la main du directeur dans la sienne… à son tour d’être le guide. Il l’entraîna dans le couloir, puis vers les escaliers… il monta les marches, et fit le même manège jusqu’au troisième étage, tout en gardant la main du directeur captive. Il sentit sa tête tourner un peu, une fois rendu au troisième. Pendant le trajet, il se mit à se demander ce qu’il allait faire, une fois rendu dans sa chambre. Il n’appréhendait pas vraiment les explications qu’il allait devoir donner au directeur, même si bien sur, il n’avait pas tellement hâte. Il ne savait pas trop ce qu’il allait dire. Probablement la vérité… C’était à savoir si le directeur allait comprendre ou pas. Quoiqu’il en soit, il se sentait un peu étrange… d’emmener le directeur dans sa chambre. Ils allaient être seuls, là, non? Yoshiyuki sentit sa tête tourner de nouveau. Ils arrivèrent finalement à la chambre de Yuki et Nobu. Yoshiyuki se demanda vaguement s’il avait laissé traîner des trucs… compromettants. Puis, il déverrouilla la porte et entra. À ce point-là, il ne savait plus trop où aller… Alors il entraîna le directeur à l’intérieur, referma la porte et resta près du mur. Ensuite, il ne savait tout simplement plus ce qu’il devait faire.

« Euh… voilà… »

Yoshiyuki regarda le directeur aller s’installer sur le lit de Nobuo, tandis que lui, toujours debout, planté contre le mur, tout près de la porte, tripotait distraitement les bandages sur son bras. Nobuo serait pas content de savoir que le directeur s’était assis là, lui qui avait un problème évident avec l’autorité. Mais il allait pas le savoir, bien sûr. Comme si Yoshiyuki allait aller lui raconter qu’il l’avait fait venir dans leur chambre. Il pouvait toujours courir. Il se mit à sourire, un peu stupidement. Puis le directeur lui dit de venir s’asseoir. Chouette, c’est le moment de se confier. Veuillez prendre de place, l’examen va bientôt commencer. Il marcha jusqu’à son propre lit. Il s’y étendit sur le dos, ironiquement, se mit à contempler le plafond au dessus de lui. Lui couché, l’autre assis, il avait l’impression d’être dans le cabinet d’un psy. Il eut envie d’éclater de rire. Se retint. Il tourna la tête vers le directeur, leva les yeux pour croiser son regard. Maintenant, fallait s’expliquer! Et dire quoi, au juste? Il n’avait pas la moindre idée. Panne sèche. Pourtant, c’était lui qui avait dit qu’il allait s’expliquer. Mais, là, ça ne lui venait tout simplement pas. Il savait ce qu’il devait dire. Il savait, précisément, pourquoi il s’était fait... Seulement, il s’agissait pas de le vomir, comme ça. Fallait qu’il trouve une façon de le dire pour que le directeur le comprenne. Pour qu’il trouve ça moins... mal, aussi, non? Il avait pas envie que cet se mette à le détester... comme les autres. Mais il fallait bien qu’il dise quelque chose. Il avait plus trop le choix, non plus. Se lancer et puis c’est tout!

« Ben voilà... Depuis que je suis jeune... ah, et puis merde, vous allez pas comprendre. Depuis que je suis jeune, j’ai ce besoin... un besoin vital de faire du mal. Parfois... j’ai des envies incontrôlables d’infliger de la souffrance. J’ai eu... beaucoup de problèmes, à cause de ça. Maintenant, j’ai trouvé le moyen d’éviter de faire mal aux autres. Quand j’en ai trop envie... ben je fais comme j’ai fait sur le toit. »

Il soupira. Il avait presque l’impression d’entendre Kyouya faire « mh, oui, continuez ». Il glissa ses mains sur son ventre.

« Ça fait passer mes envies, quand je le fais, parce que je fais du mal. Même si c’est qu’à moi... Ça me fait la même sensation. Alors voilà. Je fais ça car je veux me contrôler... Et puis je préfère me faire mal à moi-même qu’aux autres. »

Il roula sur le ventre, et plaça ses bras sur son oreiller, y déposa sa tête. Il regardait toujours le directeur. Il n’avait pas détourné le regard de ses yeux de tout le temps qu’il avait parlé. Là... il scrutait son visage, essayait de le lire. Il voulait savoir ce que le directeur pensait. Savoir si c’était foutu, avec lui. Au fond, il voulait pas trop le savoir. Il se dit qu’il devait soit flipper, soit penser que Yoshiyuki disait n’importe quoi. Mais il pouvait pas vraiment savoir. Il se mordilla la lève inférieure, continua à fixer le directeur en silence.

Yoshiyuki se mordillait les lèvres, trop nerveux de savoir ce qui allait suivre, ce qui allait se passer, après. Il se dit vaguement, qu’à force de toujours faire ça, il allait finir par ne plus avoir de lèvres du tout. Ça se pouvait bien, non? Tout de même, il n’arrêta que lorsqu’il sentit le goût désagréable du sang sur ses lèvres. Passa sa langue dessus, question d’en enlever un peu, même si ça allait clairement pas aider. Comme de fait, quelques fractions de secondes, d’autres petites gouttes commençait à perler juste là. Il plaça son visage sur sa main, qui elle était appuyée sur son oreiller, de sorte de cacher cela... Et, placé comme ça, le visage à moitié enfoui dans l’oreiller, il attendit le verdict. Parce que ça allait venir, Kyouya allait bien finir par dire quelque chose, non? Mais pourtant, ça venait pas. Il ne parlait pas. Et d’ailleurs, c’était le silence total, là. Pas un son. Depuis combien de temps ça durait, comme ça, que personne parlait? Sais pas, mais trop longtemps, c’est clair. Puis, un frottement sur le tapis. Yoshiyuki resta immobile, à l’exception près de sa tête. Il la baissa un peu plus encore. Se cacher au complet, voilà. Aucune envie de le regarder, non plus. Il battit des paupières, dans l’obscurité qu’il s’était créée... se rendit compte qu’il s’était remis à se mordiller les lèvres. Puis, il sentit le matelas de son lit se renfoncer légèrement. Il ferma les yeux et les serra fort. Génial. Kyouya était venu s’asseoir. À côté de lui. Il tourna doucement la tête vers la droite. Plus de danger de regarder, car Kyouya n’était plus ... eh bien, à droite. Il inspira lentement. Il commençait à trouver le temps long. Il en pouvait plus de sentir son coeur battre la chamade, comme ça. Et puis ce silence qui persistait... y’avait de quoi devenir cinglé. Enfin, exception faite de ceux qui le sont déjà.

Et soudain, une immense vague de frissons le parcourut. Yoshiyuki... lui qui pensait que son coeur pouvait pas battre plus vite... ben il s’était trompé, clairement. Là, c’était une évidence pour lui qu’à tout moment, son coeur allait défoncer sa cage thoracique et tout déchirer. Puis s’envoler, très très loin. Et lui il allait crever. Mais pourtant non, encore une fois. Non. Il sentait toujours les frissons. Et toujours... les doigts de Kyouya dans ses cheveux... qui le caressait doucement. Il les sentit encore effleurer sa nuque, relancer la vague de frissons. Étrangement, malgré son coeur qui faisait des sprints... c’était agréable. Il décida de se laisser faire, comme ça, un peu. Il ferma les yeux, et se détendit peu à peu. Il se sentait bien, comme ça. Le toucher de Kyouya était... réconfortant? Mais... Il avait rien à réconforter, lui. Il était juste... détraqué, non? Il n’était pas à plaindre. C’était plutôt les autres... Mais il sentait ses yeux qui s’embuaient, un brin. Et le coeur qui fait des sprints, qui se serrait, maintenant.


« Aimerais-tu que je te laisse seul présentement et qu’on en reparle plutard? »
Yoshiyuki sentit son coeur faire un bond, là-dessus. Il pivota sur lui-même, sur son dos, brusquement, et se redressa. En position assise. Il fixa Kyouya.

« Quoi? S-seul? Non, surtout pas. »

Là-dessus... Il se rapprocha lentement de Kyouya. Son geste brusque avait chassé sa main. Plus de frissons, plus rien. Mais Yoshiyuki avait pas voulu que ça arrête. C’était pas désagréable du tout... à la fin. Et puis... il préférait un coeur qui sprint qu’un coeur serré. De loin. Alors... il décida qu’il allait forcer son coeur à recommencer à courir. De gré ou de force. Alors il alla s’installer sur les genoux de Kyouya. Comme ça, avec un naturel désarmant. Comme si c’était normal, ce genre de geste. Et pourtant, Yoshiyuki, lui, se sentait tout à fait à sa place. Enfin, façon de parler. Car bien sur, y’avait encore sa cage thoracique qui menaçait d’éclater. Mais c’est ce qu’il cherchait, alors... une fois installé confortablement, il se fit glisser un brin, juste pour pouvoir sentir le contact du corps de Kyouya contre le sien. Il glissa une main sur l’épaule de l’homme, traça délicatement la forme de ses clavicules, du bout des doigts. Puis, il approcha son visage de celui de Kyouya, petit à petit... il alla frôler ses lèvres des siennes. Sentit un millier de frissons lui travers l’échine. Parfait. Tendrement, il parcourut la distance qu’il restait, entre lui et le directeur. C'est-à-dire, à peu près rien, en fait.